
Qu’est-ce que la sobriété ?
Rencontre
Qu’est-ce que la sobriété ?
Comment passer d’une société du toujours plus à une société de la sobriété
Traduction simultanée
Intervenants :
– Prof. Dominique Méda, directrice de l’Institut de Recherche Interdisciplinaire en Sciences Sociales (IRISSO) et Présidente de l’Institut Veblen, Professeure de sociologie à l’Université Paris Dauphine-PSL
– M. Ngô Tự Lập, enseignant, écrivain, traducteur et chercheur en culture, ancien directeur de l’Institut francophone international – Université nationale du Vietnam, Hanoi
On peut lire sur la brochure de l’association négaWatt : « Inégalités criantes, augmentation des atteintes à l’environnement, gaspillage de ressources limitées… En matière d’environnement, l’état des lieux est accablant. Or nous continuons à produire et à consommer toujours plus en ayant, comme l’autruche, la tête douillettement enfoncée dans le sable : les générations à venir nous regarderont comme de redoutables gaspilleurs, doublés d’insouciants pollueurs laissant à nos descendants le soin de s’occuper de nos déchets. (…) Face à ces constats, il devient urgent de se recentrer sur l’essentiel, privilégier le nécessaire et réduire le superfétatoire, éliminer le nuisible. Substituer à l’offre de surconsommation actuelle une offre d’intelligence dans la consommation : la sobriété part de là. »
La Modernité a apporté avec elle l’idée que la Nature pouvait servir de réservoir inépuisable de ressources et d’utilités au service des humains. Depuis Descartes et Bacon, s’est déployé un paradigme de la conquête et de l’exploitation de la Nature par les humains, un comportement dont l’historien Lynn White voit les germes dans le texte de la Genèse. Tous nos cadres cognitifs et nos politiques soutiennent cette idée que toujours plus de consommation et de production sont des signes de civilisation et que la vocation de l’humanité est de faire le monde extérieur à son image. Depuis les années 1960, les dangers d’une telle vision du Monde sont dénoncés. De plus en plus de voix s’élèvent, depuis le rapport Meadows, Limits to Growth, pour développer de nouveaux comportements. Aldo Leopold proposait en 1949 de mettre en place une éthique de la terre, et de passer d’un paradigme de la conquête et de l’exploitation de la terre à un paradigme du respect, de l’amour et du prendre soin. Philippe Descola nous rappelle qu’à part le naturalisme (dualisme humain/nature) il existe d’autres cosmologies et d’autres relations humains/nature. Engager nos sociétés dans la reconversion écologique suppose une bifurcation radicale : changer de cosmologie, de système de valeurs, d’indicateurs.